Foire de Beaucroissant

Quelques mots d'histoire...

Beaucroissant : un pèlerinage local à l'origine d'une foire internationale

Surprenant : la foire de Beaucroissant a dû son essor à un pèlerinage voulu par l’évêque de Grenoble au XIIIe siècle !
Les 800 000 à un million de visiteurs qui se retrouvent à la foire internationale d’automne - 1800 exposants répartis sur une quarantaine d’hectares et 15km d’allées, avec une centaine de bars et de restaurants – seraient sans doute étonnés d’apprendre que cette foire de grande ampleur est le fruit lointain d’un événement décisif survenu il y 800 ans.
Déjà depuis l’an mil, il y avait un marché traditionnel à Beaucroissant, au pied de la colline de Parménie où les pélerins venaient vénérer la Sainte-Croix tous les 14 septembre.

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Mais le développement de ce marché a pris un tournant décisif en 1220, lorsque l’évêque de Grenoble, Guillaume 1er, a conduit au pèlerinage de Parménie les grenoblois rescapés du déluge qui avait tué 5000 d’entre eux dans la nuit du 14 septembre 1219. Cette nuit-là, un tremblement de terre dans la région de Bourg d’Oisans fait sauter le barrage naturel formé 28 ans plus tôt par un éboulement de montage dans la vallée de Séchilienne, en amont du village de Livet. La rupture de ce barrage libère les eaux de la Romanche amoncelées dans le lac saint Laurent. La masse d’eau énorme dévaste Vizille et envahit le Drac jusqu’à Grenoble où, à cette époque, il se jette dans l’Isère au niveau de l’actuelle Porte de France. Des habitants montent dans le clocher de la cathédrale, ou sur les toits ou les tours des remparts. L’Isère est coupée. Pendant quelques heures son cours s’inverse et produit une immense retenue d’eau à la hauteur de Meylan. Avec la décrue du Drac, cette retenue déferle sur la ville, détruit le pont et ravage les plaines et les cultures de Grenoble et du Grésivaudan. Les morts se comptent par milliers, y compris parmi les marchands venus d’Allemagne ou d’Italie à cette période de l’année. Le Dauphin a pu se sauver sur la colline de la Bastille.

L’évêque, Jean de Sassenage, va mourir quelques mois plus tard, après avoir rédigé son célèbre mandement dans lequel il écrit : « qui pourrait avoir un cœur assez dur… pour ne pas se sentir touché de pitié à la vue… d’un aussi grand naufrage de notre cité…Quelle voix pourrait dire… la misère de ce temps, la douleur des hommes, des femmes et des enfants qui se voient périr, leurs clameurs… leurs gémissements… dont le bruit remplissait vallée, et perçait comme d’un glaive de douleur ceux qui les entendaient ?… Cependant [il faut] que nous songions à la reconstruction du pont… et nous vous ordonnons de concourir au rétablissement de cette œuvre sacrée, en donnant, suivant vos moyens, une part convenable des biens que Dieu vous a départis ».

Son successeur, Guillaume, emmènera les survivants de cette tragédie du 14 septembre à l’endroit du diocèse où l’on vénère la Sainte Croix, et où l’on confie à Dieu toutes les souffrances, y compris celles des catastrophes naturelles.

Parménie va connaître un record d’affluence et le marché de Beaucroissant aussi, avec les nombreux pélerins meurtris par ce drame sans précédent. Du XVIIe au XIXe siècle, d’autres inondations ravageront la ville et seront rapportées dans le célèbre ouvrage en patois dauphinois Grenoblo Malherou, publié en 1864 par François Blanc, dit La Goutte, et préfacé par Georges Sand.

Le pèlerinage de Parménie aura renforcé la fraternité des grenoblois éprouvés. Leur volonté inlassable de reconstruire a permis le développement de la région et, en particulier, de la foire de Beaucroissant pleine de vie et pleine d’avenir. 

 

P. Patrick Faure

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